EL PAIS Babelia

Octobre 2012

Alberto Reguera
Galerie Fernandez-Braso, Madrid Villanueva, 30. Madrid

Jusqu’au 10 novembre

La peinture devint art et se sépara de l’artisanat quand les peintres parvinrent à créer cette sensation de profondeur, grâce à la perspective et au modelé des volumes. L’art abstrait, quant à lui, s’éloigne de l’illusion de la réalité en aplanissant formes, figures et taches de couleur, réduisant ainsi son vocabulaire plastique aux éléments occupant la superficie plane du tableau. Mais tous les artistes ne suivent pas les règles émises par l’académie avant-gardiste. Alberto Reguera (Ségovie, 1961) est un peintre qui maintient bien vivant le souffle de l’abstraction lyrique, tout en prenant ses distances par rapport aux préceptes actuels. Il cherche à atteindre cette sensation de profondeur et transforme les champs de couleur en paysages imaginaires, riches de strates lumineuses.

Dans un dialogue méritoire, il travaille depuis des années sur des thématiques plastiques abstraites comme les nuages de couleur aux formes indéfinies, constellations de touches de couleur qui viennent éclabousser ou teinter la toile et emploie des pigments secs qui enveloppent la peinture. Lentement, ses œuvres ont acquis un caractère particulier qui définit, aujourd’hui, de façon inimitable sa peinture. Dans ses œuvres, la matière picturale recouvre le corps, se matérialise physiquement, se projette et coule en dehors des limites du tableau. Cette notion de peinture en tant que matière dotée de corporalité est ce qu’a représenté Alberto Reguera en donnant du volume au cadre et en transformant ainsi un tableau plat en un prisme volumétrique, un véritable corps physique à six faces qui occupe l’espace. Alors, le tableau est décroché du mur ; il est posé à même le sol et, aux côtés d’autres tableaux, il forme des petits groupes, tant et si bien que l’on parle d’installations. C’est une peinture paysagiste qui permet à l’observateur de choisir l’angle de contemplation puisque les œuvres se transforment selon l’angle d’où on les observe.

Javier Maderuelo, Madrid EL PAIS 2012


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